For now’s the time for your tears[1] : en 1979, le génocide était patent et l’accueil des troupes vietnamiennes par le peuple cambodgien en était, comme l’avait lui-même énoncé Pol Pot, la démonstration. On ignorait seulement qu’il fallait parler en millions et non en centaines de milliers de morts. Mais on savait.
Sihanouk, lui-même, après l’avoir défendu, avait très vite pris ses distances par rapport au Kampuchéa démocratique (« Nous acceptons tout, sauf le retour de Pol Pot au pouvoir »).
Pourtant, le 14 novembre de cette année-là, alors même que leur présence dans le pays se limitait à une guérilla, menée la plupart du temps depuis le territoire thaïlandais, à l’instigation des États-Unis, de la Chine, de l’Europe de l’Ouest et des états de l’ASEAN, l’Assemblée générale des nations unies, après avoir confirmé la condamnation par le Conseil de sécurité de l’intervention vietnamienne faite en janvier a décidé
- que les Khmers rouges étaient les représentants légitimes du Cambodge à l’ONU,
- d’un embargo interdisant toute aide au développement vers le Cambodge.
Deux arrêtés qui seront maintenus pendant dix ans !
On aurait pu laisser le siège vide. Non ! on l’a attribué aux bourreaux ! Thiounn Prasith représentera, de 79 à 91, le Cambodge à l’ONU. L’ONU, c’est-à-dire l’ensemble des nations.
La deuxième résolution a entraîné l’exode de centaines de milliers de réfugiés en Thaïlande[2].
Chine et Thaïlande ont apporté leur aide militaire aux Khmers rouges qui étaient sur le point de disparaître. Là encore, il y avait derrière les États-Unis : « J’ai encouragé les Chinois à soutenir Pol Pot, j’ai encouragé les Siamois à soutenir Pol Pot. Son régime était une abomination. Nous ne pouvions le soutenir nous-même, mais eux, la Chine en particulier, pouvaient le faire [puisque c’était des dictatures] » a déclaré Brzezinski.
Oui, c’est maintenant l’heure de pleurer. Le monde, dans son ensemble, a soutenu les génocidaires.