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VI - Les 9 vies de Norodom Sihanouk

VI

1941 – Le métier de roi

C’était l’une de ses premières visites depuis qu’il était roi, sa mère en avait été choquée, mais Sihanouk avait besoin de savoir si les rumeurs sur son grand-père étaient ou n’étaient pas justifiées, il voulait qu’elle corrobore de vive voix toutes ces médisances, même s’il redoutait chaque mot qu’elle prononcerait. Maintenant qu’il était en face d’elle, il n’était plus si sûr que l’attitude du vieil homme soit si condamnable. Elle était incroyablement belle avec sa lourde chevelure noire parfumée, si ténébreuse qu’elle en avait des reflets bleus. Sa voix était posée.

– Votre Majesté, tout est vrai… et faux. J’ai accompagné Sa Majesté le roi Monivong au Bokor. Il était si désespéré, il avait besoin de passer quelques jours avec quelqu’un du peuple – et vous savez mes origines modestes –, mais surtout avec une inconnue afin de ne pas avoir à parler de sa douleur. J’ai essayé autant que j’ai pu de distraire ses derniers instants, mais rien n’y fit. Oui, Sa Majesté Monivong s’est réellement retirée loin de tous pour cacher sa détresse. Mais oui, j’y étais et oui, j’ai partagé son lit… sagement, cependant. Il était trop triste, trop vieux soudain, pour autre chose.

– Je vous remercie de tout mon cœur, Madame. Vos déclarations me comblent de bonheur, car j’y retrouve le grand-père que j’ai toujours connu. Je sais que beaucoup le décrivaient comme un opiomane et un coureur…

– Sa Majesté était un homme instruit qui, sous la protection des Français, construisait le Cambodge de demain. Elle a beaucoup fait pour développer l’économie du pays, mais combien plus pour notre culture, nos traditions, notre religion. Avec nous, les artistes du ballet, elle évoquait souvent son premier voyage en France avec son père, Sa Majesté le roi Sisowath. Ils avaient émerveillé les Français et montré la richesse de la civilisation cambodgienne grâce à nous et à notre chorégraphie. Rodin[1], lui-même, voulut graver notre passage dans le marbre, il fit de nombreuses esquisses de nos figures de danse, déclarant que « ces Cambodgiennes nous ont donné tout ce que l’antique peut contenir, leur antique à elles qui vaut le nôtre ; nous avons vécu trois jours d’il y a mille ans ». Malheureusement, il renonça à nous sculpter, car la pierre n’existait pas, il aurait fallu un granit bien poli, aussi pur que le marbre, mais pas aussi dur. Chaque fois que Sa Majesté en parlait, nous avions envie d’égaler les Apsaras divines. C’était un homme merveilleux, Votre Majesté n’a pas à en rougir.

Sihanouk se leva, heureux de ce qu’il venait d’entendre, et fit un salut khmer pour prendre congé. Loin de s’offusquer comme la belle Hélène de se voir ainsi offrir des fleurs, la jeune danseuse en fut charmée.

– Que Votre Majesté pardonne mon audace, mais je voudrais lui dire que je suis ravie qu’elle ait été choisie comme notre souverain ! Votre Majesté, par sa simplicité et sa gentillesse, le mérite infiniment plus que son oncle, Son Altesse Royale le prince Monireth. Quand je l’ai prévenu que Sa Majesté le roi Monivong était mort, ce dernier est venu et m’a chassée telle une vulgaire prostituée, me proposant de l’argent pour que je me taise sans exprimer un instant la moindre compassion ni le plus petit chagrin. En quittant le Bokor, je me disais que, si mes prières avaient quelque pouvoir et apparemment elles en ont eu, jamais Son Altesse Royale ne serait roi !

– Vous avez eu tort, Madame, vous n’auriez pas dû douter du respect de mon oncle, mais c’est un homme qui ne montre guère ses sentiments.

– Vous voyez comme Votre Majesté est adorable ! Avec quel empressement vous le défendez !

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