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XVIII - Page 9 sur 16 - Les 9 vies de Norodom Sihanouk

XVIII

La Vérité voyait ses ventes grimper. C’était une entreprise familiale, son rédacteur en chef était un des fils de Georges Féray, professeur au lycée Sisowath, dans le cadre de la coopération France-Cambodge, et qui signait ses articles Yaref, l’anacyclique de Féray. Le moindre de ses écrits aurait contraint son auteur, fonctionnaire, à un retour dans son pays, tant ils déplaisaient à Paris et à Washington. Mais Yaref était le masque de Zorro, un déguisement dérisoire qui protégeait le redresseur de torts, le dénonciateur des néocolonialistes[7].

Moustic, lui aussi, participait à l’effort collectif. Il corrigeait les épreuves que lui soumettaient les typographes, son travail consistant à les comparer au texte original. Son salaire ou son argent de poche, il le gagnait lui-même en vendant dans la rue le trihebdomadaire. Pas bien loin, devant la villa de ses parents, pas beaucoup, en une demi-heure, tout était écoulé. Il était si petit et criait avec une telle conviction, que les gens achetaient autant pour le contenu du papier que pour lui faire plaisir.

C’est ainsi que, par un beau matin de juin, en proposant La Vérité, il a quitté l’enfance[8]. Il y avait, en une, une photo. Je la vois encore ! C’est une rue à Saïgon, on court en tous sens, on entendrait presque les hurlements de la foule. Décalée vers la droite, une personne brûle ; les flammes et la fumée envahissent la gauche de l’image. L’homme, en position de lotus, le dos raide, semble irréel, sa sérénité tranche avec la confusion ambiante. Il s’appelle Thich Quang Duc. C’est un bonze, il vient de s’immoler par le feu pour protester contre la politique de Ngô Dinh Diêm.

Pourquoi ? Moustic voulait tout savoir. Il interrogeait sans relâche son père. Il a ainsi appris que madame Nhu, la belle-sœur du président Diêm, la toute puissante, scandaleuse et sculpturale madame Nhu qui faisait la pluie et le beau temps à Saïgon, pillant le pays sans vergogne, avait parlé de barbecue. Phnom Penh bruissait de rumeurs ; l’enfant les recueillait, les comparait, les analysait. Il découvrait en quelques jours, pêle-mêle, la guerre du Viêt Nam, les problèmes politiques, religieux (Ngô Dinh Diêm était catholique dans un état majoritairement bouddhiste), sociaux.

1954 – 1963, il n’avait que neuf ans !

L’année, cependant, était loin d’être finie.

Henry Cabot Lodge, l’ambassadeur des É. – U. au Sud-Vietnam était arrivé à Saïgon, en août, avec des instructions claires[9] :

« Le gouvernement américain ne peut tolérer une situation dans laquelle l’autorité est entre les mains de la bande à Nhu. On doit offrir à Diêm la possibilité d’éconduire lui-même Nhu et sa coterie et de les remplacer par des personnalités militaires et politiques plus compétentes.

Si en dépit de vos efforts, Diêm reste inflexible et refuse, alors nous devons envisager la possibilité que Diêm lui-même ne puisse être préservé. […] »

Le vendredi 1er novembre, les deux frères, Nhu et Diêm, étaient capturés puis exécutés par une junte militaire. Kennedy a, paraît-il, été choqué d’apprendre leur assassinat, il aurait souhaité leur accorder l’asile politique, mais n’en avait pas averti les conspirateurs.

Madame Nhu, en voyage à Washington, a échappé au pire. Elle a alors déclaré à la presse internationale que « quiconque a les Américains pour alliés n’a pas besoin d’ennemis ». La phrase a fait mouche et Sihanouk, qui n’avait jamais aimé Diêm, encore moins depuis son conflit ouvert avec les moines bouddhistes, était épouvanté de voir le peu de cas que faisait la maison blanche de ses soutiens. Il était désormais convaincu que les États-Unis perdraient la guerre. Une semaine après, il a annoncé la fin de l’aide américaine et s’est lancé dans des réformes économiques pour ne plus en dépendre, nationalisant les banques et d’autres secteurs clefs, protégeant les entreprises face à la concurrence étrangère. Il craignait d’être à son tour assassiné. Mais ce n’est pas sur lui que, le 22 novembre, Lee Harvey Oswald a tiré.

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