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VIII - Page 11 sur 13 - Les 9 vies de Norodom Sihanouk

VIII

Jeanne se lança, c’était pour cela qu’elle et son mari voulaient que l’on fasse le point sur la situation.

– Il faut rentrer à Phnom Penh !

– Tu es folle, s’insurgea Georges. Les bombardements vont aller en augmentant, maintenant que les Français sont hors circuit. Et puis si tu savais… Hubert, tu lui as dit comment ils traitent les Français ?

– Hubert m’a tout raconté. Les familles regroupées dans un quartier, dont elles ne peuvent sortir, les hommes que l’on convoque au commissariat pour interrogatoire et qui parfois ne reviennent pas. Mais tu crois être plus en sécurité dans ce village ?

– Pour les bombes, certainement ! Et c’est déjà beaucoup. Mais je pense que pour le reste aussi. En ville, je ne connais pas les responsables japonais ; ici, ils se sont présentés pour nous saluer.

En réalité, cela allait bien plus loin qu’une simple courtoisie, mais Georges, sachant les opinions politiques de son ami, préféra taire ce qui s’était créé entre eux et les autorités locales. Les Japonais s’étaient en partie installés dans la plantation, en attendant de sécuriser les bureaux de la mairie pour en faire leur poste militaire, mais les fruits restaient à leur propriétaire légal. Les soldats étaient extrêmement polis. Tout se passait donc sans heurt jusqu’au jour où Pauline surprit un des supplétifs cambodgiens en train de manger une de ses noix de coco. Oubliant le contexte, négligeant que l’homme tient à la main un coupe-coupe, elle crie, le traite de bandit. Lui, rouge de colère, montre son arme, celle-là même qu’il a utilisée pour ouvrir le fruit, hurle que le temps des colonies est fini. Il la poursuit, fou de rage, ivre de venger sur une femme un siècle d’humiliation.

Les soldats eurent bien du mal à maîtriser le forcené. Dans la soirée, on apprit que ce dernier serait exécuté. Sans hésiter, Pauline alla demander sa grâce à l’officier, responsable de la plantation, qui l’accorda, étonné de voir une Européenne intercéder pour sauver un indigène, son agresseur de surcroit. De cet incident était né du respect, une certaine complicité. Mais Hubert avait raison : de là à se sentir à l’abri.

– Georges, s’ils nous assassinaient dans ce village, nul n’en saurait rien. Ce sont des démons ! Une consigne, un mot de trop, une cigarette trop âcre et c’est fini ! De plus, les Cambodgiens ne sont pas sûrs. La répression à la suite de la révolte des ombrelles a laissé des plaies et Sihanouk les a ravivées en annonçant l’indépendance. J’étais sur la place, j’ai entendu l’ovation qui a ponctué son allocution. Ta femme peut en témoigner !

Jeanne rajouta :

– Quant aux bombes, le regroupement est une bonne chose aussi, cela signifie, pour les aviateurs, des quartiers à éviter, cela devrait être possible… même pour des Américains !

Énervée par la tournure que prenait la discussion, Pauline se leva et alla au balcon jeter un œil sur les enfants et réfléchir à sa manière avant de donner son avis. Elle scrutait les bananiers tous proches, les cocotiers au loin, le ciel encore bleu, le soleil qui déclinait. Elle sourit, elle venait de voir frémir les hautes herbes. N’importe qui aurait dit que c’était un animal qui se faufilait, mais elle, elle savait lequel des siens se déplaçait ainsi au milieu des arbres-plantes. Georges, levant la tête, la regarda. Elle, lumineuse, baignant dans le vert brun de leur plantation, et, à côté de lui, dans la pénombre de la paillote, le visage blême et anxieux de Jeanne. Il comprit que les Mettier partiraient, qu’eux resteraient, que toute discussion était inutile. Les uns misaient sur la solidarité entre Occidentaux, les autres sur la beauté du paysage khmer.

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